jeudi 1 février 2007

Sourires et robotique


Je déjeunais ce midi avec une spécialiste des robots, non pas des robots ménagers, mais de ceux des feuilletons télévisés des années 60, qui se déplaçaient - en général sur une autre planète - parlaient, répondaient aux questions saugrenues mieux que wikipedia tout en préparant le café d'un main et réparant le véhicule de l'autre.

Elle ironisait sans dépit "30 ans déjà d'efforts persévérants, de nuits sans sommeille de sa part comme d'autres brillantes intelligences pour produire ce robot qui soit l'équivalent de l'homme, alors que l'homme existe déjà"

Avant de s'expliquer plus avant : "On construit depuis longtemps des robots sur un modèle de main à 3 doigts parce qu'il est impossible de faire un robot avec 5 doigts et que trois doigts suffisent. Pourtant essaie donc de faire une boulette de riz et la porter à ta bouche en n'utilisant que trois doigts, pense à la soie que tu froisses dans ta main et vois que ce sont l'annulaire et l'auriculaire qui sont les plus actifs et les plus gourmands, observe ta caresse, la main est asservie complètement à l'annulaire et l'auriculaire qui la guident et suscitent les émotions. A un robot, cela personne ne pourra jamais le lui appliquer".

C'est alors une vanité d'homme que de construire un monde qui nous propose des machines qui pastichent l'homme. Le voir et le reconnaître, c'est aussi dire que c'est une sottise de vanter les marchés aux puces d'ici ou d'ailleurs et de chiner sur e-bay, de parler des miches dorées de sa boulangère et de se faire livrer de blafardes baguettes surgelées par le leshop.ch, de savoir l'affection et l'attention que nous porte notre libraire qui veille prudemment à nous maintenir éveillé et se confier pourtant à amazon.com, et tant d'autres exemples, comme des fatalités quotidiennes.

De quel monde rêvons-nous et quel monde mettons-nous en place ? Qui nous propose ou nous impose ce projet, le savons-nous vraiment ? Ces questions sont celles de la nature du pouvoir et du sens de la société commune. Et à ces questions, si la réponse était "je ne sais pas" ce qui est bien ma réponse, alors à quoi serviraient les débats sur une nouvelle Constitution, ici à Genève, ou là-bas en Europe. Et si personne ne se posait cette question, alors c'est sereinement, à l'image des moutons de Panurge que l'on "s'obstinera à faire des robots qui ressemblent à l'homme sans voir que l'homme existe déjà !"

Je confesse un soupçon. Si un tel robot existait, il ne remplacerait pas l'homme qui existe malgré le robot, mais bien la démocratie. Et comme je crois à la démocratie plus qu'à la robotique, samedi, j'irai faire les puces, comme on dit en parler genevois et me réjouis de vous y rencontrer.

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